Pour le plaisir de faire du sirop
SAINT-BARNABÉ. Alors que plus de 75% de la production mondiale de sirop d’érable provient de la Belle Province, c’est un euphémisme de dire que le temps des sucres est intimement lié à l’identité québécoise.
Cette tradition ne peut être mieux illustrée que par les chaudières suspendues aux érables au printemps. À Saint-Barnabé, dans son érablière située à proximité du chemin St-Onge, Michel Désilets perpétue ce rituel depuis plus de 25 ans.
« Cette année, j’ai 1200 chaudières, mais l’an passé, j’en avais au-delà de 1300 », lance le sympathique homme de 63 ans qui allait encore il y a deux ans chercher son eau d’érable avec sa carriole tirée par un cheval.
Avec cette impressionnante quantité de chaudières, Michel Désilets réussit à produire de 75 à 80 gallons de sirop par année dans une année normale. « Habituellement, c’est 40 gallons d’eau d’érable pour 1 gallon de sirop. Ça veut dire que je fais bouillir environ 3000 à 3500 gallons d’eau d’érable dans une saison », estime-t-il.
Il met en conserve la majorité de sa production, mais fait aussi de la transformation comme de la tire, du beurre d’érable et quelquefois, du sucre du pays. « J’ai un ami qui va venir ce printemps me montrer à faire de la cassonade d’érable », souligne-t-il.
Avant autant d’entailles, Michel Désilets pourrait installer de la tubulure, mais préfère encore le faire à l’ancienne. « Tant que je ne boîterai pas trop et que j’aurai encore des chums qui viennent m’aider, je vais continuer comme ça », poursuit celui qui récompense ses aides avec quelques cannes de sirop en fin de saison.
Dans sa cabane à sucre qu’il a lui-même construite en 2016 – « j’ai 60 000 pieds de bois là-dedans que j’ai bûché et que j’ai fait scier » – il a déjà fait bouillir jusqu’à 45 gallons d’eau d’érable à l’heure, durant près de 10 heures. « Ces jours-là, il faut que tu te tiennes proche de la porte du poêle parce qu’il faut en mettre du bois pour que ça chauffe. »
Une tradition née à Yamachiche
Avant Saint-Barnabé, Michel Désilets a fait les sucres avec des chaudières durant 17 ans à Yamachiche. « Je suis né pas loin de là. C’était une cabane que j’ai retapée sur une érablière qui appartenait à un ami. Mais ici, c’est plus facile parce que ma maison est juste à côté », raconte le propriétaire de Structure d’Acier Désilets à Yamachiche qui délaisse toujours un peu son entreprise au printemps pour se consacrer à sa passion.
D’aussi loin qu’il se rappelle, il a toujours aimé la période des sucres. « Quand j’étais petit, je montais dans le bois au printemps. J’avais tellement hâte que je me ramassais souvent à la cabane avant même que le propriétaire arrive », se rappelle-t-il.
Il n’a évidemment jamais compté ses heures ni vérifié si les revenus tirés de la vente de quelques centaines de cannes de sirop lui permettaient de payer ses dépenses. « Moi, je fais ça juste pour le plaisir. Tu peux gagner ta vie à faire du sirop, mais pas comme je le fais. Les sucres, j’ai tout le temps comparé ça à la pêche. Si tu aimes le poisson, ça va te coûter moins cher d’aller à la poissonnerie parce que quand tu vas à la pêche, ce n’est pas pour sauver de l’argent, c’est pour le plaisir que ça te procure », conclut Michel Désilets.