« C’est comme si on venait d’agrandir le parc national »

ENVIRONNEMENT. Conservation de la nature Canada (CNC) vient de se voir confier un lot de 270 hectares d’habitats riches en biodiversité grâce à la générosité exceptionnelle de 22 riverains du lac à la Perchaude qui se sont mobilisés pour amasser la somme de 650 000$ afin d’acquérir le terrain qui avait été mis en vente il y a quelques mois.

Répartie sur les territoires des municipalités de Saint-Mathieu-du-Parc et Shawinigan, à près de 5 kilomètres du parc national de la Mauricie, la superficie nouvellement conservée se compose de milieux humides, d’habitats riverains et aquatiques ainsi que de milieux forestiers, dont une érablière mature. La nouvelle réserve naturelle privée est située à proximité de 300 hectares déjà protégés par CNC, incluant deux secteurs de la Réserve naturelle de la Tortue-des-Bois-de-la-Shawinigan.

« C’est comme si on venait d’agrandir le parc national d’une certaine façon », a souligné Denis Trépanier, un des donateurs, mais surtout l’instigateur de cette mobilisation qui débute en février 2021 alors que le Shawiniganais apprend que le propriétaire du terrain le mettra bientôt sur le marché.

« On peut avoir tendance à tenir pour acquis que tout le monde veut conserver ces territoires-là, les garder intacts, mais la vérité est un peu différente. Une fois que ça se met en vente, on réalise qu’il y a des opérateurs forestiers qui voudraient bien les avoir les beaux plateaux et leurs vieilles forêts. Les immenses érablières présentent un fort risque d’être mis en production commerciale. Puis tant qu’à y être, pourquoi pas aussi un développement de villégiature? » s’est remémoré Denis Trépanier.

Rapidement, le riverain du lac à la Perchaude réunit cinq ou six voisins, un groupe qui s’élargira finalement à 13 familles, soit une vingtaine de personnes qui réunissent personnellement la somme de 650 000$ comme mise de fonds. La transaction avec le propriétaire du terrain, un résident de Trois-Rivières, sera complétée grâce à une contribution de 700 000$ du gouvernement du Québec et de 800 000$ du gouvernement fédéral. L’investissement de plus de 2,1 millions$ comprend non seulement le coût d’acquisition, mais aussi tous les frais associés et la mise en place d’un fonds de gestion qui se met en place pour chaque acquisition afin de pouvoir poursuivre une gestion de la propriété à long terme. 

Interrogé sur les motivations des donateurs, Denis Trépanier a souligné que tous partageaient la volonté de vouloir conserver les « paysages immédiats et environnants nos propriétés. Le respect pour la vie et pour les écosystèmes. Il y a aussi le désir de garder un accès privilégié à ce territoire-là, puis même de s’en occuper en devenant éventuellement bénévole pour la cause. Pour les plus jeunes familles, il y avait aussi des motivations qui étaient de permettre aux enfants de continuer à aller jouer dans l’érablière. Il y a aussi chez chacun des donateurs le désir profond de poser un geste concret pour l’environnement, en pensant aux générations à venir évidemment. C’est tout de même un privilège, il faut le réaliser, de pouvoir avoir autant d’impact. »

Fous de l’environnement

Confiée à CNC qui a déjà débuté les inventaires des lieux et élaboré un plan de gestion, la nouvelle réserve naturelle renferme entre autres des milieux humides qui contribuent notamment à stocker le carbone, à atténuer les inondations et à filtrer l’eau.

« C’est un territoire très riche qui relie le parc national de la Mauricie et la tourbière Lac-à-la-Tortue. On retrouve sur le territoire une multitude d’habitats, d’écosystèmes différents. On a une érablière mature hyper riche. On retrouve aussi des champs où nichent le goglu des prés et la sturnelle des prés qui sont des espèces qui nichent au sol et qui ont besoin d’espaces ouverts. Il y a de grands territoires humides qui traversent en diagonale avec la tortue des bois », explique Gabrielle Cauchon-Déry, chargée de projets pour CNC.

Fait à noter, ce territoire est adjacent au 127 kilomètres carrés que Reliefs mauriciens – anciennement Aire protégée de Saint-Mathieu-du-Parc – travaille depuis deux ans à faire reconnaître comme une aire protégée à part entière.

« On n’est rien d’autre qu’une belle gang de fous, fous de la conservation et de la protection de l’environnement, de notre environnement avant tout. Fous et maintenant très fiers, c’est le sentiment qui revient beaucoup dans le groupe », a conclu Denis Trépanier au nom des 22 donateurs.

Donateurs

Jacques Bois

 Mathieu Duchaine et Charlotte Jolicoeur Desroches

 Alain Grenier et Thérèse Delisle

 Charles André Horth et Brigitte Lepage

 Famille Jacob-Roy

 Jean-Hugues Langlois et Toby Stewart

 Etienne Laplante-Courchesne

 Martin Lapointe

 Alan et Judith Renshaw

 Denis Trépanier et Annie Jacques

 Chantal Trépanier

Quatre donateurs désirent rester anonymes