Le combat de Cynthia Gagné
SANTÉ. Une résidente de Saint-Boniface part en croisade pour sensibiliser les femmes aux dangers de l’implantation de bandelettes d’incontinence urinaire.
Cynthia Gagné a livré le 21 mars dernier à l’émission Enquêtes, de Radio-Canada, un témoignage percutant sur les conséquences qu’a eu sur sa vie cette chirurgie d’une vingtaine de minutes exécutée en novembre 2015.
D’athlète accomplie qui a pédalé au Grand défi Pierre Lavoie et couru des demi-marathons, la femme de 42 ans a abandonné aujourd’hui toute activité sportive et peine à sortir aisément de son véhicule certaines journées.
Après avoir consulté plusieurs médecins qui n’arrivaient pas à expliquer ses douleurs physiques, c’est un reportage diffusé sur TV5 en novembre 2018 qui lui a mis la puce à l’oreille. En Europe, l’implantation de cet équipement médical est déjà fortement contestée. En Grande-Bretagne, elle est même suspendue depuis juillet 2018. En Australie, le gouvernement a offert ses excuses aux femmes qui ont subi cette opération.
Cynthia Gagné s’est donc énormément informée et a pris contact avec des femmes de partout dans le monde pour en savoir plus. L’enseignante au Carrefour Formation Mauricie a ensuite créé un groupe Facebook fermé auquel plus de 89 femmes ont adhéré pour échanger sur leur expérience.
Premier constat, ces femmes n’avaient jamais été avisées par leur médecin des dangers que présentaient les bandelettes de polypropylène (un type de plastique) bien que Santé Canada ait publié des avis en ce sens en 2010 et 2014. «Ici en Mauricie, presque toutes les femmes qui ont eu cette chirurgie avaient la même urologue et aucune n’a été informée qu’il pouvait y avoir des complications», dénonce-t-elle.
Pour le reportage d’Enquête, Cynthia Gagné s’est même rendue aux États-Unis chez un chirurgien spécialisé dans le retrait de ces bandelettes afin d’obtenir son diagnostic. L’opération est hautement complexe car au fil du temps, l’équipement synthétique adhère aux tissus humains et au réseau nerveux. «C’est exactement comme si tu avais une gomme prise dans tes cheveux. Au Québec, cinq spécialistes m’ont proposé cinq solutions différentes, mais j’ai servi de cobaye une fois, je ne le servirai pas deux fois», déclare la jeune femme.
Des conséquences sous-estimées
Ces bandelettes étaient implantées annuellement plus de 20 000 fois au début de la décennie 2010 au pays mais ce nombre a chuté de moitié après les mises en garde de Santé Canada. Entre 5 et 10% des femmes éprouveraient des problèmes après la chirurgie mais Cynthia Gagné est convaincue que ce nombre est plus important.
Des recours collectifs ont été entrepris contre des fabricants et d’autres sont en attente d’autorisation. C’est le cas de Johnson & Johnson, celui qui a produit la bandelette implantée dans le corps de la Mauricienne.
Au-delà d’une compensation financière à venir, Cynthia Gagné veut surtout mettre en garde les femmes contre cette opération et surtout, que les médecins en informent leur patiente. «Il y a des chirurgies plus naturelles ou même des exercices pour régler des problèmes d’incontinence urinaire avant d’en arriver là.» Elle veut également que d’ici à ce que des spécialistes soient formés au Québec pour retirer ces bandelettes, la RAMQ supporte le coût des soins pour celles qui seront opérées aux États-Unis. On parle d’environ 20 000$ américains, auxquels il faut ajouter environ 5000$ pour l’hébergement et le transport.
«C’est beaucoup d’argent mais au-delà de ça, c’est de savoir qu’on a du plastique dans le corps à un jeune âge et qu’on ne sait pas ce qui va arriver dans 20, 25, 30 ans si on le laisse là», termine-t-elle d’un ton à la fois inquiet mais déterminé.
Pour les femmes qui vivent une situation semblable, il est possible de joindre le groupe Facebook/Bandelettes pour incontinence urinaire mesh