«Je me sens très impuissant devant la justice»
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Sébastien Bois, intervenant en défense de droits des consommateurs au Service d’aide aux consommateurs (SAC) de la Mauricie, nous a mis en contact avec deux victimes d’arnaques qui trouvent leur source sur Internet. Elles nous offrent leur témoignage de façon anonyme, leur cause étant encore en suspens.
Les deux victimes ont porté plainte à l’Office de la protection du consommateur.
La première est Mme France Duplessis (nom fictif), une résidente de Grand-Mère. Sur son fil Facebook, une publicité annonce un tirage lui permettant de gagner de l’isolation gratuite de son entretoit d’une valeur de 9300$. Elle s’inscrit, on la rappelle le lendemain. Un «inspecteur en énergie doit valider sa participation au tirage». Retraitée et habitant seule, elle reçoit dans la même semaine l’inspecteur en question. Il lui affirme que sa maison est pleine de dangereuses moisissures, sans tests et sans avoir inspecté l’entretoit.
Le problème pourrait être réglé, lui dit cet «inspecteur» (soudainement transformé en vendeur itinérant) en ajoutant une thermopompe et en réisolant le grenier. On dit même à Mme Duplessis qu’elle ferait de grosses économies sur sa facture d’Hydro. Madame signe un contrat pour une thermopompe, l’isolation du grenier et pour la vaporisation d’un produit antifongique. Sur papier, c’est 14 600$, associés à financement qui font gonfler la facture à plus de 23 000$. Une inspection indépendante réfute tous les diagnostics et révèle surtout que la valeur de travaux proposés ne dépasse guère les 4000$.
Elle décide de résilier le contrat dans les 10 jours, la veille des travaux prévus. L’équipe d’installation arrive tout de même. Avec l’aide du Service d’aide aux consommateurs, Mme Duplessis porte plainte à l’Office de la protection du consommateur, ainsi qu’à la Corporation des maîtres électriciens du Québec, l’installateur n’ayant pas ses cartes de compétence. Mme Duplessis recevra des appels agressifs de l’entrepreneur et même une visite à son domicile. Elle ira même se cacher au sous-sol en attendant son départ.
«Un stress énorme, effrayant. J’ai été assez et chanceuse de m’en sortir sans payer. C’est des manipulateurs. J’ai passé la nuit debout à faire des recherches. J’ai découvert que c’était de l’arnaque. J’ai vite réalisé que je venais carrément de me faire avoir», raconte-t-elle.
Ils viennent le vendredi en fin d’après-midi. Devant elle, le vendeur lui dit «je vais essayer de voir si une équipe ne pourrait pas se libérer pour demain». Bingo. Les travaux sont effectués en hiver et en dépit du fait qu’elle leur ait dit qu’elle a résilié le contrat. «Tu n’as pas le temps de réagir, tout est fermé. J’ai même appelé le vendeur, lui ai dit que je voulais résilier le contrat et qu’on avait 10 jours pour résilier un contrat de vente itinérante.»
Aujourd’hui, la cause n’est pas tout à fait résolue. Nous devons taire le nom de la compagnie en question. «Le directeur de la compagnie m’appelait régulièrement, me harcelait, me demandait de l’argent, 7000$, 5000 , 3000$. Il savait bien que j’avais résilié le contrat. Ça a été horrible», nous dit celle que nous avons appelée Mme Duplessis.
Une entreprise sous enquête lui colle une hypothèque légale
Nous l’appelons M. G. Il habite le secteur de Grand-Mère et sera victime du même stratagème de «maison verte» et d’un vendeur itinérant du même acabit camouflé derrière le titre d’évaluateur en efficacité énergétique. M. G. se confie à nous.
Dans son cas, la situation se dégrade rapidement. Il risque gros. Si bien que sa maison est aujourd’hui sous hypothèque légale, même si la compagnie qui le poursuit est sous enquête par l’Office de protection de la protection du consommateur du Québec.
Là encore, Sébastien Bois intervenant en défense de droits des consommateurs au Service d’aide aux consommateurs (SAC) de la Mauricie intervient.
Le lendemain de son inscription au tirage de l’isolation gratuite de son toit, on lui téléphone. Dans la semaine même, on se présente chez lui. Le stratagème est le même.
«À la fin de la rencontre, écrit la SAC Mauricie, Monsieur G. hésite à signer un contrat de près 13 000$ prévoyant des travaux que d’autres ont estimés à moins de 3000$.» Le vendeur lui fait miroiter d’importantes économies et même une garantie du meilleur prix pendant 30 jours, explique M. G. Mais du même souffle, il le menace de le dénoncer à la Régie du Bâtiment du Québec pour protéger la santé de leur enfant disait-il, mis à risque par des moisissures dangereuses détectées dans le comble du toit. M. G. signe donc sous la pression, mais annule son contrat dans un délai de 10 jours, tel que prescrit par la Loi. Il reçoit rapidement une menace d’hypothèque légale sur sa maison. Elle prend effet quelques jours plus tard.
«Je me sens très impuissant devant la justice et en attente devant tous les frais, confie-t-il. Personne ne viendra t’aider à payer et à te défendre devant des gens comme ça. Ils te montrent comme quoi ils connaissent ça, qu’ils ont la meilleure solution. Ils voulaient absolument que ça se fasse en dedans de deux jours.»
Depuis les faits survenus en février 2020, Monsieur G. tente toujours de faire rayer l’hypothèque légale sur sa maison et a déboursé plus de 3000$ pour protéger les droits que lui confère la Loi sur la protection du consommateur. Le client leur a même offert de leur rembourser les 200$ de laine minérale installée.
Aujourd’hui, l’hypothèque légale est maintenue et affecte son crédit au quotidien. Son avocate semble confiante. Plusieurs plaintes ont été déposées à l’Office de la protection du consommateur contre la même compagnie dont on taira ici encore le nom ajoute M. G.