Québec solidaire divisé sur l’affaire Haroun Bouazzi

MONTRÉAL — Les propos du député solidaire de Maurice-Richard, Haroun Bouazzi, sur le racisme allégué à l’Assemblée nationale sèment la division au sein de son parti.

Rabroué publiquement par les porte-parole, Gabriel Nadeau-Dubois et Ruba Ghazal, M. Bouazzi peut toutefois compter sur le soutien d’au moins 11 associations de circonscription.

Ensemble, elles vont soumettre au congrès dimanche une proposition d’urgence, qui demande au parti d’appuyer M. Bouazzi et de dénoncer «la campagne de diffamation dont il est l’objet».

Haroun Bouazzi est actuellement au centre de la controverse pour avoir affirmé que tous les jours, il entendait à l’Assemblée nationale des propos qui dépeignaient l’Autre, l’immigrant, l’autochtone, avec une culture dangereuse.

Ses propos ont suscité un tollé dans toute la classe politique, au point où M. Nadeau-Dubois et Mme Ghazal ont dû rappeler à l’ordre leur collègue pour ses déclarations «maladroites, exagérées et polarisantes».

Samedi soir, à la fête organisée pour souligner l’élection de Mme Ghazal comme co-porte-parole féminine — elle a obtenu un score de 91 %, — tous les députés solidaires ont endossé la position des têtes dirigeantes.

Mais «si un parti de gauche ne défend pas ces gens qui osent appeler un chat un chat, où est-ce qu’on s’en va?» s’est interrogée Carmen Chouinard, une militante.

«Moi, ça me préoccupe énormément quand, à chaque fois qu’il y a un problème au Québec, on blâme l’immigration», a ajouté le solidaire de longue date François Saillant.

La proposition d’urgence affirme que «certains élus de l’Assemblée nationale ont multiplié les interventions qui présentent l’immigration sous un jour négatif, voire une menace».

Elle soutient que «les propos d’Haroun Bouazzi ciblaient très clairement ces discours qui contribuent à alimenter la peur de l’Autre» et demande à QS de lui donner tout son appui.

«Je me sens vraiment bien aujourd’hui entouré de solidaires», a brièvement réagi M. Bouazzi lors d’une mêlée de presse, samedi soir.

Dépoussiérer les statuts

Les délégués de QS sont réunis en congrès spécial cette fin de semaine pour revoir les statuts du parti, qui datent de 2006.

Selon, M. Nadeau-Dubois, il s’agit de faire «une mise au point sur notre machine militante (…) pour qu’elle soit bien huilée» en vue de l’élection générale de 2026.

«Ce n’est pas une petite rénovation de salle de bain qu’on fait; c’est une rénovation d’ampleur de l’ensemble de la bâtisse de Québec solidaire», a-t-il déclaré.

Les changements proposés font 81 pages.

En après-midi, les délégués ont voté pour qu’un an après les élections, les co-porte-parole soient élus au suffrage universel, c’est-à-dire par l’ensemble des membres du parti.

Jusqu’à maintenant, ce vote revenait uniquement aux délégués.

On choisira aussi à ce moment-là qui des deux porte-parole sera le «chef» du parti au sens de la loi électorale. À l’heure actuelle, c’est le secrétaire général de QS qui a ce statut légal de «chef».

Ce changement permettra à QS de se conformer aux exigences du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) pour la tenue de courses à la direction.

Puis, un an avant les élections, les délégués choisiront le porte-parole qui pourra se présenter comme aspirant premier ministre et participer aux débats des chefs.

Cette personne aspirante première ministre sera automatiquement faite cheffe parlementaire, notamment afin de lui donner plus de visibilité dans les médias.

Ces changements ont pour but d’accroître les dons, le recrutement des membres et l’influence de ces membres au sein du parti, selon la présidente de QS, Roxane Milot.

Parité

Par ailleurs, QS s’est donné les moyens d’imposer des candidatures féminines lors des élections générales ou partielles.

Les délégués ont voté samedi pour que le Conseil national puisse «adopter des critères qui déterminent la représentativité des personnes qui peuvent se porter candidates».

Le libellé ouvre la porte à toutes sortes de critères, comme une présence minimale des minorités visibles, sexuels ou de genre.

L’an dernier, s’inquiétant de la non-parité au caucus, les délégués avaient adopté une mesure temporaire afin d’exiger une candidature féminine en cas d’élection partielle.