Northvolt: QS dénonce le «saccage» de l’acceptabilité sociale de la filière batterie

QUÉBEC — Les partis d’opposition à Québec fustigent le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, qui a affirmé mardi à «La Presse» que l’usine de batteries de Northvolt n’aurait pas vu le jour si l’entreprise avait dû se soumettre à un examen du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). 

Le député solidaire Haroun Bouazzi dénonce ce qu’il considère comme «un saccage en règle de l’acceptabilité sociale de la filière batterie avec des agissements comme ceux-là». 

M. Bouazzi pense qu’il est encore temps de mettre en place un BAPE et affirme que cela ne signifierait pas nécessairement que Northvolt quitterait le Québec. Il soutient du même souffle qu’un processus accéléré est possible. 

En entrevue avec «La Presse» mardi, le ministre de l’Environnement a affirmé qu’un BAPE aurait trop retardé le projet d’usine de batteries, ce qui aurait compromis sa réalisation. Selon M. Charette, il était impératif d’agir rapidement pour que le gouvernement atteigne ses cibles de réduction en matière de GES.    

Québec vise à réduire ses émissions de 37,5 %  par rapport à 1990 d’ici 2030. 

«La CAQ est devenue la pire alliée du projet»

La députée libérale Virginie Dufour salue le fait que le ministre ait «enfin fait preuve d’une certaine transparence», mais soutient que «l’acceptabilité sociale du projet ne cesse de décliner et c’est en raison du manque de transparence de la Coalition avenir Québec (CAQ)».

«La CAQ est devenue la pire alliée du projet actuellement», a-t-elle lancé. 

Selon la députée, il reste encore trop de zones d’ombre dans ce dossier et elle demande donc une «rencontre d’urgence» avec le ministre Charette. «Si on pouvait avoir une rencontre pour dissiper les doutes pour qu’ensuite on rame tous dans la même direction pour ce projet-là», a-t-elle affirmé en entrevue avec La Presse Canadienne. 

«Cheerleaders du développement manufacturier»

Selon le péquiste Joël Arseneau, le ministre «admet avoir induit les Québécois en erreur depuis des semaines sur le changement des règles. Il admet que Northvolt a obtenu tous les passe-droits souhaités».  

«Le ministre prouve par ses déclarations qu’il renie ses responsabilités de protéger l’environnement, assurer la conservation et la mise en valeur de la biodiversité et jouer un rôle clé dans la transition climatique, dans une perspective durable, pour jouer les cheerleaders du développement manufacturier», a-t-il indiqué dans une déclaration écrite transmise à La Presse Canadienne.  

Le ministre Charette s’est défendu sur X mercredi matin. «Je continuerai de le répéter, le Québec possède l’un des cadres d’évaluation environnementale des plus rigoureux en Amérique du Nord. L’absence d’un BAPE à la première phase du projet Northvolt n’exclut absolument pas le respect des normes par l’entreprise», a-t-il écrit. 

«Échéancier serré»

Dans une déclaration écrite, Northvolt indique que «depuis le début des discussions avec les gouvernements du Québec et du Canada, nous avons été transparents et clairs à propos de l’échéancier serré du projet et les conditions de succès liées à notre implantation au Québec». 

«Nous évoluons dans un contexte où la capacité à livrer des projets dans les temps est une condition essentielle de réussite et où la compétition mondiale est féroce, alors que la Chine et les États-Unis subventionnent massivement des projets comme le nôtre», ajoute le porte-parole de l’entreprise, Laurent Therrien. 

La controverse au sujet du projet d’usine de Northvolt ne cesse de prendre de l’ampleur. En septembre 2023, Radio-Canada a notamment révélé que Québec a haussé le seuil minimal de fabrication de cathodes pour qu’un examen du BAPE soit déclenché de 50 000 à 60 000 tonnes. L’usine de Northvolt devrait en produire 56 000 tonnes. 

«Nous n’avons pas fait de démarche pour modifier des seuils déjà présents dans la réglementation. L’article concernant la matière active de cathode, qui établit désormais le seuil d’assujettissement à 60 000 tonnes, a fait l’objet d’une préconsultation dès décembre 2022, à laquelle Northvolt n’a pas participé», a indiqué Laurent Therrien. 

La phase trois du projet de Northvolt – une usine de recyclage de batteries – sera, quant à elle, soumise à un examen du BAPE. 

Qu’est-ce que le BAPE? 

«Le BAPE a pour mission d’éclairer la prise de décision gouvernementale en transmettant au ministre responsable de l’Environnement des constats et des avis qui prennent en compte les préoccupations de la population et qui s’appuient sur les 16 principes de la Loi sur le développement durable», peut-on lire sur le site internet de l’organisme. Le BAPE n’a pas le pouvoir d’autoriser ou de refuser un projet; c’est le gouvernement qui prend la décision finale.