Gestion de l’offre: les producteurs ne veulent aucune concession
AGRICULTURE. Pendant que les négociations se poursuivent pour renouveler l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) à Washington, les producteurs agricoles de la région sont inquiets face à la menace qui plane sur la gestion de l’offre. Selon plusieurs observateurs, le principal obstacle des négociations demeure la gestion de l’offre puisque les Américains souhaiteraient avoir accès au marché canadien des produits laitiers. Cette gestion de l’offre sera-t-elle sacrifiée pour parvenir à une nouvelle entente de l’ALENA ? Le Syndicat de l’UPA de Maskinongé espère que non, même si les indications sont contraires. «La petite brèche qu’ils peuvent faire dans la gestion de l’offre, aussi petite soit-elle, peut avoir d’importantes conséquences chez nous. Ce système fonctionne très bien, il ne coûte rien à la population, ni même au gouvernement. Ça permet de contrôler la production et d’avoir de la vitalité dans les régions du Québec», confie le président Martin Marcouiller, conscient de la sensibilité du dossier. Afin de protéger le milieu agricole canadien contre les industries étrangères du lait, des œufs et de la volaille, le gouvernement canadien a instauré, à partir de 1972, ce système de gestion de l’offre pour non seulement stabiliser les prix au pays, mais aussi dans le but de limiter les importations et de contrôler l’offre. La gestion de l’offre laitière au Canada procure équilibre et équité aux producteurs. «Les Américains en ont trop de lait. Si on ouvre la porte, tout le surplus sera envoyé au Canada. Les transformateurs vont avoir plus de volume et ne voudront probablement pas payer plus. S’ils baissent le prix du lait, ça va avoir des impacts très importants sur nos producteurs. Présentement, les fermes sont accotées. Elles survivent justement avec ce système de gestion de l’offre efficace», souligne M. Marcouiller. Moteur économique Considérée comme un véritable moteur économique, l’agriculture est très importante dans la MRC de Maskinongé. Dans les faits, le territoire regroupe le plus important nombre d’agriculteurs en Mauricie et contient plus de 500 fermes. «Des fermes familiales, il n’y en a pratiquement pas aux États-Unis. Ce sont des grosses fermes et le gouvernement subventionne beaucoup. Elles n’ont pas les contraintes que nous on a, que ce soit au niveau de l’environnement, du climat, des infrastructures, de la santé et du bien-être animal. Ce sont toutes des règles qu’on s’est imposées nous-mêmes pour assurer une certaine qualité. On ne peut pas non plus exporter notre lait. On a décidé de respecter notre production.» Selon M. Marcouiller, les conséquences économiques et sur le plan personnel seront très importantes si le Canada fait preuve d’une certaine flexibilité sur la gestion de l’offre. «Il faut s’attendre à des faillites, à des fermes qui vont fermer, à des emplois directs et indirects de moins et l’occupation du territoire sera affectée. La relève a pris le relais de plusieurs fermes et des compromis dans la gestion de l’offre pourraient venir les affecter grandement. Ce serait un autre dur coup sur la tête de ces gens-là. Nos fermes familiales sont très importantes dans nos régions», reconnait le président du Syndicat de l’UPA de Maskinongé. Rappelons que des concessions ont déjà été faites dans la gestion de l’offre au cours des dernières années lors des négociations de l’accord entre le Canada et l’Union européenne et le Partenariat transpacifique. Appuis politiques Dans cette période électorale, Martin Marcouiller reconnait que les partis politiques du Québec appuient les producteurs agricoles dans leur souhait de conserver intégralement le système de gestion de l’offre. Il espère cependant que cet appui sera maintenu après le 1er octobre prochain. «Il faut qu’après les élections, les appuis soient maintenus envers le milieu agricole. Le gouvernement n’a pas toujours été là pour supporter l’agriculture. Pourtant, les retombées économiques sont tellement importantes! Aussi, l’argent que nos producteurs font, ils le réinvestissent localement pour s’améliorer et se perfectionner. Pour performer, il faut investir. L’agriculture fait partie de l’économie et il faut en tenir compte dans les décisions», exprime-t-il. Par ailleurs, le milieu agricole profite des élections provinciales pour réitérer ses revendications envers les partis politiques, soit d’instaurer des mesures pour limiter l’accaparement des terres agricoles, de bonifier le soutien financier sur les investissements en milieu agricole et de supporter la relève. Finalement, il estime que le gouvernement doit se positionner sur la taxation municipale de façon à ce que tous les producteurs soient taxés à leur juste valeur. Suivez Pier-Olivier Gagnon sur Twitter: @POGagnon